Une sélection un peu plus ouverte, semble-t-il, que les années précédentes. Ainsi l’une, Karine Locatelli, vient du Canada; tel autre, Raymond Guerrier, dont on voit des collages si caractéristiques de l’Ecole de Paris, est décédé en 2002; une troisième, Natalia Jaime-Cortez, représentée par une galerie parisienne, etc…
Soixante-deux artistes, c’est beaucoup, mais c’est un salon et on ne s’en plaindra pas. Une invitée d’honneur : Rosa Loy, représentée par une galerie de Leipzig. Et en bonne place, Gregory Compagnon, prix Révélation du salon art paper 2018.
On s’est réjoui de certaines retrouvailles : Abraham Haddad, dont les qualités de lithographe avaient autrefois attiré notre attention, présente ici des dessins. De même Brigitte Derbigny qu’on n’avait pas vue, me semble-t-il, depuis quelques années à Lyon. Ou la rare et grande Raymonde Godin, née au Canada, mais parisienne dès les années 50, et liée au regretté Paul Kallos, dont on avait admiré le travail il y a quelques années dans la galerie Terres d’écritures à Grignan.
Autour de ceux-là, les artistes de qualité ne manquent pas. Sans pouvoir les citer tous, on a remarqué les fusains poétiques d’Olivier Brunot, les dessins nerveux de Nina Urlichs adoucis par la superposition de papiers différents; ceux de Christine Célarier sur l’atelier, de Raphaël Lam qui rythme de bandes géométriques des souvenirs de pages de livres, ou de Laurent Karagueusian dont les papiers écorchés conduisent à un papillonnement de lumières vibrantes. En fouillant dans un carton, on trouvera de lui de petites pointes sèches fort subtiles, elliptiques, pleines de retenue, propres à satisfaire l’amateur que rebute l’esbroufe et le spectaculaire.
Ce qui nous amène aux graveurs, peu nombreux, mais malgré tout bien présents, avec des pièces nouvelles et fortes.
Jocelyne Besson Girard explore les visages, qui semblent rester au bord de leur apparition dans l’image, dans un instant de suspension assez suggestif.
Claire Borde poursuit son chemin en augmentant le format de ses estampes où une aquatinte nocturne laisse apparaître traits et taches lumineuses qui s’animent, et prennent sens.
Gilbert Houbre montre une suite de dessins aux beaux noirs, qui vont devenir gravures, des scènes quotidiennes et/ou dramatiques, qui ne se laissent pas d’emblée saisir, entre rêve et réalité.
On retrouve Didier Hamey et son univers si particulier, drôlatique et mystérieux, habité de figures comme on n’en voit jamais. De même on revoit avec plaisir les estampes de Muriel Moreau, qui invente un théâtre végétal silencieux et celles, à la fois fermes et fines de Vanessa Durantet, et on mesure dont on mesure dans ses cartons la diversité du travail.
Enfin, on découvre, venant de Bruxelles, Valentin Capony. Lyonnais, il a été formé à Saint-Etienne avant de parfaire son apprentissage à l’Académie royale de Belgique. De là viennent de beaux morceaux de gravure, parfois immenses (l’une, To revolve 2, fait 123 x 200 cm), d’une simplicité formelle radicale. Ici c’est un réseau de lignes ondulantes et verticales comme des cheveux longs et flottants, là c’est la perfection d’un mouvement circulaire répété qui dessine un soleil noir, dont on ne croit pas qu’il soit celui de la mélancolie, mais qui marque dans le métal, puis sur le papier, le temps qui passe, la jouissance du geste créateur, et sa lenteur comme son énergie.
P.B.
Art paper 2019, salon de dessin contemporain,
Palais de Bondy, Lyon.
Du 3 au 6 octobre 2019
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