Graal

On arrive à la fin du premier temps de cette étrange et inimaginable période. 

Demain, ce journal des confins mettra en ligne les souvenirs des quelques graveurs qui ont répondu à mon appel sur leur première gravure. Et dimanche, cela prendra fin. 

 J’avais à parler encore de maître ES, le premier graveur à inscrire ses initiales sur une estampe, de l’écho de la gravure sur les écrivains, par exemple R. Bresdin vu par Huysmans, ou Callot vu par Baudelaire. De Voltaire qui utilise l’estampe pour faire vibrer l’opinion publique naissante. De l’atelier Hayter qui a formé tant de graveurs du XXème siècle. De Sébastien Bourdon, mon graveur préféré du XVIIème siècle. De ma méfiance envers les estampes du grand Callot. De la naissance de l’URDLA. Des dernières acquisitions du mois (de quoi s’étonner par exemple que, malgré tout, deux belles gravures sur japon, dans un état avant lettre, d’Antoine Vollon, graveur du XIXème, ait pu arriver sans encombre du Royaume-Uni)…

On se contentera de terminer par un aveu, celui de la gravure que par-dessus tout on voudrait tenir en mains. Regarder de près et de loin. Renifler. Elle n’est pas parmi les plus chères (il faudrait choisir Picasso ou Rembrandt), ni parmi les plus connues (Rembrandt ou Picasso).

Soyons plus modeste. Il y en a beaucoup. S’il faut choisir, le Graal, aujourd’hui, ce serait une estampe de Pissarro. Chez Pissarro graveur, tout est bon. Il est un « peintre graveur ». Un peintre qui aime la gravure, la cuisine de la gravure, le jeu des bains, des essuyages, des grattages, les essais, les états.

Celle-là, je la cherche. C’est presque rien. Un morceau de papier de 11,5 par 15 cm. Un concentré d’impressionnisme. Un concentré de l’art du XIXème. Réminiscence de la peinture italienne, écho de la peinture de son temps, préfiguration d’un paysage quasi abstrait du XXème siècle. Une planche intemporelle. Une estampe qui fait rêver…