Jean-Marie Albagnac, 1931

 Jean-Marie Albagnac, d’une famille originaire de l’Aveyron, est né à Saint-Etienne. Il y suit sa scolarité, entre aux cours du soir de l'Ecole des Beaux-Arts de Saint-Etienne de 1948 à 1953 tout en exerçant le métier de graphiste, de décorateur de vitrines.

Il commence à peindre, puis élève de Weisbuch, à graver et à présenter à Saint-Etienne ses premières estampes ; par des connaissances stéphanoises, il est invité à rencontrer le sculpteur François Stalhy qui lui consacre en 1957 un article dans la revue d’art internationale Graphis, et qui, responsable de la sélection française au musée de Zurich, le fait exposer à l’exposition « Formes françaises » avec Adam, Dubuffet, Friedlander, Hartung, Picasso, Villon.

 

Ayant obtenu le Prix Abd-el-Tif en 1957, il passe les années 1958 et 1959 à Alger. Lors d’une exposition de gravures à la villa, une amie d’André Breton lui propose de rencontrer le poète, qui le reçoit à son retour en France rue Fontaine à Paris. « Vous avez le sens du merveilleux comme je l’entends » dit le poète, si intéressé qu’il lui propose de participer à l’exposition surréaliste sur l’érotisme alors en préparation. Réservant sa réponse et tardant à le faire, Albagnac laisse passer l’occasion. Mais l’année suivante, il accompagne les artistes surréalistes présentés en novembre 60 par Breton et Duchamp à la galerie D’Arcy de New York dans l’exposition « Intrusion surréaliste dans le domaine de l’enchanteur ». Cette exposition rassemble avec les premiers surréalistes (Bellmer, Brauner, Miró, Magritte ou Matta) des artistes ayant appartenu à Dada comme Picabia et Duchamp, des artistes de l’art brut (Aloïse), Joseph Cornell mais aussi Robert Rauschenberg et Jasper Johns.

 

En 59 Raymond Cogniat le fait participer à la 1ère Biennale des jeunes à Paris, et il expose dans l’atelier de François Stalhy à Meudon, où il croise Giacometti. Exprimant son admiration pour les dessins de l’artiste, ce dernier l’invite chez lui. Il y passe une après-midi, scrutant les dessins du maître, montrant les siens ; à la fin de la visite, Giacometti lui propose de revenir « pour voir s’il a fait des progrès ». 

 

Il multiplie l’année suivante les expositions, participant à la Biennale internationale de gravure de Tokyo et Osaka, avec Giacometti, Miro, Picasso, Soulages, Ubac... Il est exposé au Musée du Luxembourg, participe au Salon de Mai avec le  groupe Le Trait.

En 1961, ayant remporté le Prix de la maison Descartes, une bourse lui permet de passer six mois à La Haye, où il poursuit ses recherches, à Amsterdam et à Rotterdam, en compagnie de sa compagne Maria Albagnac-Vivès, qu’il épouse en septembre. 

 

La même année, A. Breton, dans un texte daté du 7 décembre 61, lui consacre une préface pour une exposition à la galerie Plaine. Il écrit en conclusion  «  Pour Albagnac, comme pour la plupart de ses grands devanciers, le propulseur duquel est attendu l’essor n’est autre que l’immémorial et à jamais tout puissant symbolisme sexuel dont nous savons depuis Freud qu’il régit les mythes, les légendes et déchaîne la vie imaginative du dormeur comme de l’homme éveillé. La gloire de notre époque sera d’avoir partiellement levé l’interdit qui pesait sur lui.  Par la grâce d’Albagnac, les changeants ramages de l’amour et les retombées de pollen se lovent dans les fumées de Saint-Etienne. »

En 1962, une exposition personnelle à la galerie La Jeune Parque, qui à Lyon dans les années 60 expose P.A. Gette, Ughetto, Walter, ou le photographe R. Ohanian, lui vaut des articles de René Déroudille et de Jean-Jacques Lerrant.

De nouveau sélectionné en 1963 pour la Biennale des jeunes de Paris, il se voit proposer l’édition d’une gravure.

 

Mais les succès d’estime ne suffisent pas à vivre : la vie est difficile dans l’atelier où manque le confort de base. En 1964, il est nommé sur concours à l’école des Beaux arts de Moulins comme professeur de gravure. Il s’installe dans la proche campagne bourbonnaise. Lors d’un voyage dans la région en septembre 66, il rend visite dans sa maison de Saint Cirq Lapopie à Breton ; ils évoquent la possibilité de se revoir à Paris : « si je suis encore là » ajoute Breton, qui décède quelques jours plus tard.

Apprécié de ses élèves, avec lesquels il noue des relations d’amitié, il n’est pas chahuté quand arrive mai 68, alors même qu’il fait fonction de directeur et qu’il propose une belle exposition des travaux d’élèves au musée de Moulins. Mais le temps passé à enseigner et à diriger l’école, à organiser aussi des expositions publiques (Stahly, Dado, Dufour, Krasno, Descloseaux...) réduit d’autant le temps consacré à la gravure.

De 64 à 73 date de la fermeture de l’école des Beaux Arts de Moulins, il n’expose que deux fois : une exposition intitulée « Images de veille », préfacée par Alexandre Bonnier, qui parle d’un « somnambule extra-lucide... qui nous propose « de devenir ce dormeur éveillé pour aimer les images oniriques qu’il nous rapporte » (Préface de l’exposition) en 66 au musée de Moulins, et une autre en 72 à la MJC de Dôle. 

 

En 1976, il s’installe à Lyon, où il est nommé pour être professeur de gravure à l’Ecole Nationale des Beaux Arts. Il y passe le reste de sa carrière professionnelle, et il revient à la gravure, participant régulièrement à des expositions à Lyon (en 80 et 81, à l’Espace Lyonnais d’art contemporain (ELAC), pour les expositions collectives « Permanence du regard surréaliste » ou  « Taille douce la mémoire du geste », à Grenoble, Dole, Tarare, à Tours, Gravelines (« La gravure en relief », Paris (Salon Le Trait en 89, le salon de Mai en 93) , ou à l’étranger (Cracovie et Torun en Pologne, Mazinales en Colombie).

Malade à cause de l’acide, il arrête de graver en 1990, date à laquelle l’URDLA édite une de ses gravures, et se met à l’aquarelle et à la photographie ; il donne un livre de photos intitulé La dame à l’escargot, publié par Michel Guinle et la galerie Poisson d’or en 1993, avec deux textes de présentation écrits par l’écrivain Pierre Bourgeade et par Jean-Jacques Lerrant, critique au Progrès de Lyon pour qui, « Albagnac graveur de l’imaginaire, quand il devient photographe, ne peut se borner au constat, même quand il s’agit du territoire à fantasmes qu’est le corps féminin ».

 

En 1999, il quitte l’école des Beaux Arts, à l’âge de 68 ans, continuant d’exposer notamment à l’exposition « De Delacroix à Matisse » au Musée du Louvre (oct.2003-janv. 2004), ou à l’exposition « International Tsai-Mo Art Flag Show » à Taïwan en mars. 

 

 

L’oeuvre gravé

Une cinquantaine de planches, probablement, dont le catalogue reste à faire, ont été tirées, a majorité en très peu d’exemplaires, à 12 ou 13 en général, sur BFK Rives. Il a expérimenté l’eau-forte, la pointe sèche, le cliché verre, la linogravure.

Nous avons rencontré 20 estampes dont nous donnons ci-dessous les titres avec les renseignements dont nous avons pu disposer, et pour certaines d’entre elles une photo.

 

 

 

1. Vénus des carrières, eau-forte,  1957 ? 1959 ?  12 ex.

2. L’homme trompé par l’amour, eau-forte, 13 exemplaires (vers 1960 ?) 

3. La barque de l’amour, eau-forte, 1961  

4. La Prisonnière, eau-forte, 12 ex., 33 x 51 cm,  34ème exposition "Le trait" 1962

5. Parade de l’idole, 15 ex., 29,8 x 19,5, sur velin du Marais, sans date (pour l’exposition à la galerie Parti pris de Grenoble en 62, préfacée par Breton)

6. Hymne à l’amour, 13 ex., 19,8 x 29,7, sur velin du Marais (exposition « Parti pris) sans date (1962)

7. Naissance de Chrystiane, 15 ex., 39,8 x 23,6, sur velin de Rives, sans date  (1962) (exposition « Parti pris »)

8. Possession, eau-forte, sur Rives, 13 ex., 30 x 19,5, sans date (1962 ou 63) (exposition « Parti pris »)

9. L’étrange chemin, eau-forte  33 x 50,5, 20 ex.

10. Ambiguïté cosmique, 140 exemplaires, Paris Biennale de Paris, 1963 ou 66 selon la BNF

11. Sans titre, eau-forte 1970

12. Lieux ceints, eau-forte, 75 ex, 39 X 57

13. Pour un art révolutionnaire, eau-forte 1968 

14. Pour les impénitents, eau-forte, 1972

15. Le dentellier, eau-forte, Paris, le Trait 1975

16. Les voyants, 32,5 x 50, 120 exemplaires,

17. 1980- 90  Long cadavre exquis, lithographie, 56 x 76 30 ex (URDLA)

18. 1980- 90 Sans titre, Cliché-verre, 24 x 30, 6 ex. (URDLA)

19. Lieux noués, linogravure (Urdla, 1988)

20. La mémoire du regard cendré traverse le miroir et traverse le temps eau forte, vernis mou et point sèche, 65 X 80, 18 ex (URDLA) 1992 

 

 

Liste des expositions

 

Personnelles

1953 Libraire Plaine (Saint-Etienne)

1956 Galerie Creuse (Paris)

1959 Atelier Stahly (Meudon)

1961 Galerie Plaine (préface de A. Breton) (Saint-Etienne)

1962 Galerie la Jeune Parque (texte de Déroudille, JJ Lerrant) (Lyon).

1962 Galerie Parti Pris (Grenoble)

1967 « Images de veille », Musée de Moulins.

1972 MJC de Dôle.

1993 Expostion avec les photos de sa femme Maria Vives au Centre culturel André Malraux (Tarare).

1997 Exposition au Centre culturel d’Epinal.

1998 Galerie du Toboggan, avec sa femme Maria Vives (Décines)

 

Collectives 

1955 « Formes françaises », Zurich

1956 Arts du Forez  (Saint-Etienne)

1959 Villa Abd-el-Tif

1959 1ère biennale des Jeunes (Paris)

1959 Musée d’art moderne (Paris)

1959 Galerie Inspiration (Périgueux) avec Weisbuch, Odile Krier, Marcel Didi.

1960 Exposition organisée par Breton et Duchamp à la Galerie D’Arcy « Intrusion surréaliste au domaine des enchanteurs », New York.

1960 Biennale internationale de gravure de Tokyo et Osaka.

1962 Expostion du Cercle des lettres et des arts, Musée de Saint-Etienne.

1963 3ème biennale des jeunes (Paris).

1980 Exposition « Taille douce, l’art du geste », ELAC (Lyon)

1981 Exposition « Permanence du regard surréaliste » (ELAC (Lyon)

1981 Festival de la gravure (Uzès).

1982 Exposition de gravures avec l’école des Beaux Arts de Saint-Etienne (Cracovie).

1983 Exposition avec sa femme à Mazinales (Colombie)

1986 Galerie (Tours)

1986 « La gravure en relief », Musée de Gravelines

1987 Exposition à Tarare, Saint-Etienne, Paris, Compiègne.

1989 Exposition au Salon Le trait (Paris), et à l’URDLA. (Lyon)

1990 Exposition Le Radiant (Caluire).

1991 Exposition de gravures à Torun (Pologne)

1993 Salon de Mai (Paris) et participation à des expositions à Lyon.

1997 Exposition aux Arts du Forez (Sint-Etienne)

2000 Exposition « PHOTOgravure la photo comme estampe », à l’URDLA (Villeurbanne)

2003 « De Delacroix à Matisse, dessins français du Musée d’Alger »,  Musée du Louvre (Paris)

2003  International Tsai-Mo Art Flag Show, Taïwan.

2016 Presbytère de Fontevraut, « Trois artistes des années 50-70, Albagnac, Gachet, Le Mab», anciens prix Abd-el-Tif.

 

 

 

Sources :

Entretiens avec l’artiste.

Biographie rédigée par l’artiste.

Brochure Biennale de l’art, Espace culturel A. Malraux, Tarare, 1993.