Né en 1924 d’un père fonctionnaire en poste à Montbrison, dans la Loire, Edouard Eymard, après un enseignement secondaire dans sa ville natale, fait des études artistiques aux Beaux-Arts de Saint-Etienne (1947). Un peu en froid avec son père qui ne voit pas d’un bon oeil une carrière artistique, il gagne la capitale en 1948 pour parachever ses études de peinture et travailler selon sa volonté. Il y fréquente l'atelier Mac Avoy à la Grande Chaumière et l’atelier du vrai à l’académie Colarossi. Il fait ensuite toute sa carrière à Paris, où il connaît des débuts difficiles. En 1958, il se marie avec une jeune femme d’origine allemande dont il aura deux enfants. Il occupe ensuite un atelier au pied de Montmartre, rue de Trévise. Devenu parisien, il garde cependant toute sa vie des attaches fortes avec sa région natale et avec le pays d’origine de sa famille, Prades, en Haute-Loire.
Il fait ses premières expositions à Saint-Etienne, à la Galerie Cizeron (1948) qui l’accueille plusieurs années de suite (de 1947 à 1952) et à Paris en 1949 (galerie Barreiro, rue de Seine). Par la suite, il adopte une position de méfiance envers le système des galeries, auxquelles il reproche de vivre sur le dos des artistes. De là un petit nombre d’expositions particulières : moins d’une dizaine à Paris. En revanche, il est l’objet d’une vingtaine d’expositions grâce à des institutions locales dans la Loire (musée de Saint-Rambert en 1968, 1975, 1989 et 1997, Centre des Pénitents à Montbrison 1979 et 1987), ou la Haute-Loire (abbaye de la Chaise-Dieu en 1977…).
En revanche il participe à de nombreuses expositions de groupe à Paris ou dans la région parisienne, par exemple dans la Galerie de Seine (1957-1958), les galeries Yves Michel (1960), ou Germaine Henry (1959-1963) … et à l’étranger (Mexico, Florence, Minneapolis, Atlanta, Athènes).
Sa présence est aussi constante dans les salons parisiens : salon de la jeune peinture (1954, 1955), salon Comparaisons au Musée d’art moderne (1958, 1959, 1962, 1964), salon des Réalités nouvelles (1974). On le voit aussi au salon du Sud-Est lyonnais, quatorze fois entre 1959 à 1988. A partir du début des années 1990, sa présence sur les cimaises des galeries ou des musées se raréfie.
On peut observer que durant quarante ans environ, de 1950 à 1990, Edouard Eymard a constamment pu montrer sa production, et avec un certain succès puisqu’il a toujours vécu de sa seule peinture, soutenu, il est vrai, par son épouse dont les revenus professionnels mettaient la famille à l’abri du besoin et lui assurait une relative sérénité.
Ses premiers travaux figuratifs, encore marqués par Cézanne et le cubisme, relèvent de la jeune peinture française née entre les deux guerres. Mais assez vite, vers 1955, il abandonne la figuration et se tourne vers l’abstraction, dans le sillage des peintres de la seconde école de Paris, révélés pendant la guerre : Manessier, Bazaine, Singier et d’autres ont pour lui figure de maîtres.
Il compte parmi ses amis les graveurs André Jacquemin, Jacques Ramondot, dont on pourrait dire qu’il est un correspondant figuratif d’Eymard, le peintre et prêtre André Gence, ou Alkis Pierrakos, un artiste grec installé en France en 1954.
Sa recherche de peintre tend à une harmonie des formes, non géométriques, et des couleurs, et surtout le rouge, un rouge éclatant, brûlant comme un feu. L’abstraction trouve son origine dans les paysages du pays d’origine, dans les formes des roches calcaires, dans les amoncellements de rochers qui marquent les paysages de Haute-Loire ou de Lozère : même abstraites, ses toiles ou ses gravures trouvent le plus souvent un titre qui fait référence à une réalité concrète, paysage ou temporalité.
Tout en tenant la peinture pour son activité principale, à partir de 1952 il découvre la gravure. Il crée dans les années qui suivent un oeuvre de quarante ou cinquante estampes, des pointes sèches accompagnées de burin, ce qui correspond le mieux à son tempérament.
Puis au milieu des années 60, il se tourne vers l’émail sur acier, et peu à peu abandonne la gravure (1967). Avec les plaques émaillées, il se tourne notamment vers l’art sacré, produisant des panneaux pour parements d’autel ou des portes de tabernacles.
Eymard est un peintre ordonné et méticuleux qui tient de manière très exacte dans de grands cahiers à spirales un compte rigoureux de sa production et de ses ventes : on découvre aussi cet aspect de sa personnalité dans la façon précise dont il titre et annote ses estampes : si elles sont normalement signées et numérotées au recto, chacune porte au verso le procédé, le titre, la date de création.
Dans le souci de maîtriser entièrement son oeuvre, il fait fabriquer spécialement, selon ses desiderata, des cadres pour ses peintures ou ses plaques émaillées.
L’examen de ses cahiers montre qu’il produisait lentement et donc relativement peu, même si, aux dire de son épouse, il travaillait constamment. Dans les années 1950 par exemple, son activité le conduit en moyenne à une quarantaine de toiles chaque année.
Ses gravures, en petit nombre, tirées chez Mourlot, n’ont pas eu la possibilité d’une grande diffusion : il faisait tirer généralement à peu d’exemplaires (en nombre impair de 5 ou 9 ou 15 ou 21) , qu’il numérotait en chiffres romains à partir de 1954, ce qui signifie qu’il les considérait comme des épreuves d’artiste. Sur les trente-cinq estampes que nous avons pu voir, le tirage le plus important est de 25 exemplaires. Ses deux dernières estampes, d’assez grand format, sont tirées l’une à 15, l’autre à 20 exemplaires.
On donne ci-dessous quelques exemples de son oeuvre gravé. Il s’est intéressé à la figure humaine, à des paysages urbains voire industriels, à des paysages naturels, à des villages rencontrés ou aimés au cours de ses voyages. Il a gravé dans les années 50 assez régulièrement de petits cuivres pour servir de cartes de voeux. On voit que les premières estampes, figuratives, cèdent la place, à partir de 1955, aux représentations abstraites..